Romain Molina : “J’espère que les dirigeants bordelais sont préparés, car si on commence à l’énerver…”

    Gustavo Poyet

     

    Romain Molina, journaliste freelance spécialiste de l’Uruguay et du football anglais, est intervenu sur le sujet du nouvel entraîneur des Girondins de Bordeaux, Gustavo Poyet. Probablement l’analyse la plus complète et précise du nouvel entraîneur du club au scapulaire.

     

    Brighton

    “Gus’ Poyet, ça me rappelle ses premières années de coach, en troisième division anglaise, à Brighton. C’est vrai que j’ai toujours un amour immodéré pour les divisions inférieures au Royaume-Uni, et Poyet restera toujours le mec qui a fait de Brighton – un club absolument historique mais moribond, et avec des difficultés financières – ce qu’il est aujourd’hui. Si Brighton en est là actuellement, c’est en grande partie grâce à Poyet, il les a remontés d’une situation délicate et les a installés dans les premières places de Championship, mais sans obtenir la montée en Premier League, avec notamment une défaite en demi-finale de playoffs contre Crystal Palace qui lui coûtera son poste, non pas parce qu’ils avaient perdu, mais parce que Monsieur Poyet, après le match…  quand tu lui tends un micro, à Gus Poyet, tu peux t’attendre à tout ! C’est genre un baril de nitroglycérine. Son surnom, pour l’anecdote, c’est ‘radio’, car quand il était joueur – grand joueur – il parlait tellement que les types, en Espagne (Real Saragosse), l’ont appelé Gus ‘radio’ Poyet ! Il ne fait que parler. Mais si tu te mets à tailler le bout de gras en parlant football avec Poyet, pour ceux qui aiment les bières, il va falloir préparer plusieurs tournées, car le mec ne fait que ça. Donc, après cette demi-finale, il avait expliqué qu’il n’était pas sûr de rester, qu’il ne pouvait rien garantir aux joueurs. Il avait déjà eu beaucoup de tensions avec le board de Brigton… Bon, le board de Brighton, on peut le comprendre […] Il était alors auréolé d’une réputation de coach joueur, qui faisait repartir son équipe de derrière, ça a été un des pionniers à ouvrir le jeu en Championship”.

     

    Sunderland

    “Quand il arrive à Sunderland, où c’était très chaotique avec Paolo Di Canio, il a essayé de faire pareil. Ils avaient un jeu sympa, mais c’était toujours un peu le bordel car Sunderland a toujours été un club qui est pétaudière terrible où aucun coach n’a rien réussi à faire depuis des années là-bas. Ca a été mi-figue mi-raisin, mais que pouvait-il faire de plus ? On a alors retrouvé son caractère irascible, il s’était embrouillé avec les fans en les traitant de personnes qui vivaient dans le passé que le ‘kick and rush’ c’était fini […] Certains joueurs ne comprenaient pas ses méthodes. Il avait par exemple imposé des séances de basket à ses joueurs, il avait fait installer un panneau de basket dans le centre d’entraînement. Il faut savoir que la père de Gus Poyet était le capitaine de l’équipe de basket d’Uruguay, et il estimait que le basket pouvait vraiment aider les footballeurs dans le marquage individuel et la fixation. Il a ce côté pluri-disciplinaire que j’aime beaucoup. Je sais aussi qu’il a utilisé l’athlétisme pour corriger les positions de pieds. Il est assez novateur, il lit beaucoup, se cultive, et il cherche toujours à se remettre en questions. Mais c’est vrai qu’il ce caractère assez irascible”.

     

    Les autres clubs et l’arrivée à Bordeaux

     

    “Il a connu trois expériences malheureuses : AEK Athènes, Betis Séville et Shanghaï Shenhua (Chine), trois échecs. Il a besoin de se relancer et avait déjà essayé de postuler en France ces dernières années, ça n’avait pas pu se faire […] C’est vraiment un mec passionné, passionnant pour les joueurs, qui a beaucoup de caractère et qui peut aller au clash […] Il aime ça quand ça rentre dedans, mais avec toujours cette idée de jeu de commencer par derrière. Donc ce sera intéressant. J’espère que les dirigeants bordelais sont quand même préparés, car si on commence à l’énerver sur les entrainements, les joueurs, je sens que ça peut être sympathique. Après, ‘est-ce que Bordeaux a besoin de ça ?’. Je ne sais pas, mais je trouve que c’est une bonne idée de relancer Poyet même s’il reste sur des expériences plutôt ratées. Donc on va voir…”.

     

    Retranscription Girondins4Ever