Lizarazu : “Pogba doit se persuader que jouer juste n’est pas un manque d’ambition”

    Paul Pogba

     

    Avant et après chaque match de l’Équipe de France, Bixente Lizarazu parle d’un sujet en rapport avec la sélection nationale. Cette fois-ci, ce sera Paul Pogba, buteur contre les Pays-Bas.

     

    « Pour moi ce match doit être une référence pour Paul Pogba, il doit s’en servir de modèle pour maintenir le cap. Face aux Pays-Bas, il a su jouer simple et vite, or, jouer simple, ce n’est pas simple. En sortant de son registre habituel, qui, dans le passé, a pu l’inciter à tenter des gestes techniques compliqués, à prendre des risques et à perdre des ballons dans des zones dangereuses, il est devenu, l’espace d’un match, le vrai chef d’orchestre du milieu de terrain français. Dans l’image qu’il a de son propre jeu, Pogba se dit peut-être que pour faire un bon match, il doit marquer, réaliser des dribbles incroyables et être spectaculaire. À la limite, j’aurais presque préféré qu’il ne marque pas pour qu’il voie qu’on peut le trouver très bon sans être buteur ou spectaculaire. Griezmann et Payet, les autres leaders techniques, n’étaient pas dans un grand soir et c’est en grande partie grâce à Pogba que la France a eu la maitrise du jeu lors d’une première période particulièrement aboutie. L’équipe s’est mise au diapason de sa simplicité et de sa sobriété du moment. Contrôle, passe, jeu long, jeu court, c’était varié et propre. Pogba doit se persuader que jouer juste, ce n’est pas un manque d’ambition, ce n’est pas se contenter de peu : jouer juste, c’est jouer pour l’équipe, jouer pour initier le mouvement et imposer le rythme du match. Sa partition de la première période est un modèle à reproduire. Quand Pogba fait sobre, il devient plus efficace, plus collectif, il devient plus beau. Qu’il ait marqué un but ne change rien à l’analyse de son match, c’est en étant ‘minimaliste’ qu’il s’est rendu indispensable. On a aussi beaucoup parlé de son positionnement pour expliquer des prestations peu abouties. À deux milieux, il serait moins libéré, un peu frustré… mais au final, ce match indique que son rendement n’est pas lié à son poste ou n’est pas qu’un problème de poste. Désormais, je me pose la question suivante : cette sobriété affichée dans le jeu ne va-t-elle pas à l’encontre de sa nature profonde, d’une envie de jouer flamboyante et de sa personnalité démonstrative extravertie ? Autrement dit, a-t-il pris vraiment du plaisir, à Amsterdam, pour ne pas être tenté de revenir en arrière ? J’ose l’espérer car, moi, j’en ai pris beaucoup en le regardant jouer ainsi et ses partenaires aussi ».

    L’Equipe