Lizarazu : “Les petits chatons de San Siro se sont transformés en lions de Lescure”

    Bixente Lizarazu

     

    Demain, ce sera les 20 ans du fameux Bordeaux-Milan du 19 mars 1996. A cette occasion, sur L’Equipe21, Bixente Lizarazu est revenu sur ce moment unique et marquant de sa carrière. “C’était plus qu’un match de Coupe, c’était un moment de folie. On n’a pas gagné la Coupe de l’UEFA mais on se souvient de ce match-là comme si c’était une finale que l’on avait gagnée. Comme si on avait gagné la meilleure équipe du monde”.

     

    Il se souvient de cette saison et de l’avant Bordeaux-Milan. “On a fait une préparation spécifique pour la Coupe Intertoto, on a démarré la saison avant tout le monde, on a fait beaucoup de matches, donc on est un peu cuits. C’est pour cela qu’on ne peut pas gérer à la fois le championnat et la Coupe d’Europe. Mais on est obsédé par la Coupe d’Europe, on sent un petit truc… On se retrouve en quart de finale face au Milan AC qui est juste la meilleure équipe du monde. Si tu prends la liste des joueurs de cette équipe, elle est incroyable… On a perdu 2-0 à l’aller, on n’a pas tenu la comparaison du tout en plus, c’était un costume trop grand pour nous de jouer face au Milan AC, à San Siro […] On partait au Cap-Ferret, on allait manger des huitres, se balader sur la plage, faire des trucs… Aujourd’hui, tu regarderais ça, ça fait un peu rugbyman quoi… Afin de prendre du plaisir ensemble. Il y avait un super état d’esprit, quelque chose entre nous, une amitié… Et il y a les frissons qui montent au fil des jours…”.

     

    Puis il parla du jour J. “Je n’ai jamais vu une ambiance comme ça à Lescure, c’était électrique. Le public était en transe plus d’une heure avant le match. Ça chantait de partout. On pleurait carrément… Les supporters étaient hystériques, on était plusieurs joueurs à être pris par l’émotion. A ce moment-là je me suis dit qu’on était mal barré parce que trop d’émotion avant le match, en général tu passes à côté, tu joues le match avant… […] Je me sentais investi dans le truc. J’avais passé des années à Bordeaux et quand on m’a donné le capitanat, je me suis dit ‘je suis capitaine quoi !’. Je me comportais comme tel, ambiance rugby un peu ! Limite se mettre des gifles avant le match avec les gars, se frotter les oreilles, on se fait une petite mêlée. J’étais dans ce monde-là…”.

     

    Quant au match en lui-même. “En fait on a mis une tactique en place très simple : il fallait qu’on marque lors des vingt première minutes. Gernot nous avait dit ça. Si on voulait avoir l’espoir de se qualifier, il faut qu’on marque dans les vingt première minutes […] Normalement Richard Witschge est de l’autre côté mais il me met une transversale parfaite. Je la vois arriver. Je la revois cette situation alors qu’il n’y a pas beaucoup de situations que tu revois après une carrière. J’ai le temps de voir mon adversaire, et de me dire que ce ballon va arriver un peu entre deux donc c’est celui le plus déterminé qui aura ce ballon. Il met des heures à arriver (rires). J’ai un contrôle favorable, je pars en débordement… Le but de Didier Tholot est le déclic de ce match, parce que ça se passe comme tu l’as décidé. Le public était déjà en transe mais là ils sont tous en folie, tu vois les milanais se demandent ce qui leur arrivent, se disent que les mecs courent deux fois plus vite qu’eux… […] Sur le deuxième but, l’arbitre est avec nous, laisse tomber, tu sais que tu as la réussite (rires). Ça te galvanise, ça te gonfle. C’est ça que je trouve fantastique dans un match de foot, c’est comment psychologiquement ça bascule d’un côté ou de l’autre […] On savait qu’il fallait marquer le troisième mais aussi qu’il ne fallait pas prendre ce but, alors il y a eu un petit moment de flottement. Puis la libération est arrivée avec le dernier but de Duga […] Les petits chatons de San Siro se sont transformés en lions de Lescure… Il y a des choses qui ne s’expliquent pas dans la vie d’un club. C’est un des plus moments de ma carrière sportive. Pourtant, ce n’était qu’un quart de finale, et j’avais l’impression que c’était une finale”.

     

     

    L’Equipe 21

    Retranscription Girondins4ever