Séchet : “Jouer pour gagner”

    L’entraineur de Raon l’Etape, Jean-Philippe Séchet, a été interviewé par Eurosport en marge de la réception des Girondins de Bordeaux. Une interview intéressante où il parle de ses joueurs, méconnus du grand public, mais aussi de la manière avec laquelle il compte embêter Bordeaux. Une vision claire des choses.

     

     

    La Coupe de France occupe-t-elle les esprits de vos joueurs avant leur huitième de finale face à Bordeaux ?

    On prend les matches comme ils viennent. Nous voulions atteindre les 32es de finale de la compétition et nous voilà en huitièmes de finale. C’est tout bénéfique pour l’équipe qui continue son parcours sans se poser de questions. Nous avions démarré très difficilement notre Championnat avec 3 défaites en quatre matches. On s’est remis en marche car on a récupéré un élément important comme Maxime Kelsch, qui s’était blessé pendant la préparation, on a signé Regui et récupéré aussi Benkkajane. Ils ont apporté un plus et les anciens se sont mis au diapason. Je dois dire que notre victoire à Sarre (0-2, le 8 septembre lors de la 5e journée) a été un match fédérateur dans notre saison. Ils ont cherché à nous priver de ce succès sur tapis vert pour une question de qualification de Benkkajane. Cela n’a pas touché le groupe qui n’a pas d’individualités mais une vraie équipe, une véritable entité.

     

    Ce sera un moment historique pour Raon-l’Etape…

    C’est la première fois dans l’histoire du club qu’on atteint les 8es de finale de la Coupe de France. En plus, Epinal s’est également qualifié. Deux clubs des Vosges à ce stade de la compétition, cela doit être historique au niveau départemental. Il y a aussi Nancy pour représenter notre région, la Lorraine. On est tous passés grâce à des exploits. C’est exceptionnel !

     

    La préparation de ce rendez-vous très attendu n’est pas idéale avec des matches de championnat qui ont été reportés à cause du mauvais temps…

    Nous vivons un mois de février difficile avec trois matches reportés et que nous allons devoir rattraper. Il y en a un qui est déjà programmé pour le 13 mars mais les deux autres seront fixés en fonction de notre match de Coupe de France. La Fédération a eu la bonne idée de nous mettre 6 matches en 28 jours en février. On est dans les Vosges et en hiver ! Il faudrait quand même se poser des questions par rapport à tous ces matches de CFA ou de National qui sont remis. Ce ne sont pas des temps pour jouer comme on l’a vu en Ligue 1 avec Sochaux-OM ou Saint-Etienne-Montpellier. Ne vaudrait-il pas mieux étirer la saison jusqu’à fin juin surtout que nos joueurs, qui sont amateurs, ne partent pas en vacances à cette période car ils ont encore les enfants à l’école. C’est hallucinant ! Pourquoi ne pas calquer le calendrier des championnats de CFA et de CFA 2 sur celui du rythme scolaire. Cela ferait un mois de vacances en juillet mais de quoi la FFF a-t-elle peur ? Qu’il y ait un sélectionnable en équipe de France qui se fasse remarquer (sourire).

     

    Sentez-vous une effervescence autour de vous avant ce match face à Bordeaux ?

    On sent un engouement autour du club au niveau des supporters qui appellent davantage pour avoir des invitations pour le match. Mais il ne faut pas se tromper d’objectif et il ne faut pas snober le Championnat. C’est notre pain quotidien ! Si on gagne nos trois matches en retard, on peut accrocher le bon wagon. Donc prenons les matches les uns après les autres. C’est ce que je rabâche à mes joueurs avant ce match de Coupe face à Bordeaux.

     

    Que pensez-vous de votre futur adversaire bordelais?

    Avant leur match face à Lyon (0-4), je vous aurais dit que leur force était leur défense. Ils sont en difficulté dès qu’un ou deux éléments (Planus, Henrique ou Mariano) manquent à l’appel. Sané est plus emmerdant au milieu de terrain qu’en défense. Quant à Obraniak, que j’ai connu à Metz et dont j’ai suivi la carrière, il ne faudra pas lui laisser deux mètres pour qu’il arrive à placer ses frappes ou ses centres. Il faudra leur couper la liaison entre la défense et le milieu de terrain. Les obliger à jouer long, car nous avons des atouts défensifs à faire valoir ! C’est une équipe du haut de tableau de Ligue 1. C’est une superbe vitrine pour mes joueurs qui sont pour la plupart passés par des centres de formation et qui ont été recalés. Ils possèdent les bases du football professionnel. A eux de montrer qu’on ne leur a pas laissé assez de temps pour mûrir car certains pourraient jouer en Ligue 2. Bordeaux sait qu’il n’aura pas à faire à un bloc de 10 joueurs retranchés devant leur gardien.

     

    Vous êtes un entraîneur qui prône le jeu offensif…

    Ma philosophie, c’est de s’entraîner pour progresser et de jouer pour gagner. A chaque match de Championnat, il y a 4 ponts à prendre et je ne veux pas faire de 0-0. Il faudra attaquer pendant cette rencontre de Coupe et sortir du match sans avoir de regrets et se dire : ‘ah, si j’avais fait ça….’ J’ai regardé la vidéo du tour précédent de Bordeaux à Moulins (1-2) et ils n’ont pas su tuer le match en première période. Ensuite, les Girondins ont profité de deux erreurs d’inattentions pour marquer. Il faut croire en nos chances. On est concentré pendant 90 minutes et on a fait ce qu’il fallait, cela me convient. Si cela ne suffit pas, ce sera la logique des choses que Bordeaux passe ce 8e de finale.

     

    Après l’arrêt de votre carrière de joueur, vous avez créé une société d’informatique et de communication mais vous êtes revenu vers le ballon rond au poste d’entraîneur. Pourquoi ce choix ?

    Je suis toujours gérant de cette société. Je l’ai créée il y a douze ans avec mon épouse. Je donne toujours des coups de main même si c’est ma femme qui s’en occupe. Je fais les payes ou les factures quand j’y suis. Quand tu es footballeur, tu as beaucoup de temps libre. Je ne suis pas allé en boite ou me boire des pintes au bar. J’allais en cours et j’ai étudié à la chambre des commerces. A la fin de ma carrière, je voulais monter une affaire. Je suis donc resté en Lorraine car je voulais voir grandir mon fils. Et quand il est devenu grand, il m’a dit qu’il regrettait de ne pas m’avoir vu jouer quand j’étais professionnel. Maintenant, je suis devenu entraîneur après être passé par des clubs régionaux (Audun-le-Tiche, Toul et Creutzwald). Raon-l’Etape m’a donné ma chance à un niveau plus haut. Je ne cherche pas la lumière et je n’en ai pas besoin. J’évolue le plus naturellement possible.

     

    Pourquoi vous ne vous reconnaissez plus dans le football professionnel comme vous l’avez récemment déclaré ?

    Je parlais de la mentalité actuelle de nos jeunes footballeurs qui sont des néo-pros et qui touchent déjà des salaires astronomiques car leurs clubs ont peur de se faire piller. Mais ces jeunes n’ont encore rien prouvé. A mon époque, il fallait être un joueur confirmé pour toucher un gros et beau salaire. Les clubs marchent sur la tête et c’est la meilleure façon de voir ces jeunes partir en vrille. On le voit bien désormais en lisant les pages des faits divers.

     

    Il y a un club où l’argent est roi désormais, c’est le PSG, où vous avez évolué une saison (34 matches toutes compétitions confondues en 1994-1995). Auriez-vous aimé tomber contre eux en Coupe de France ou lors du prochain tour en cas de qualification ?

    Non, j’aurais préféré un club mythique comme Saint-Etienne avec ses supporters emblématiques. Lens ou l’OM même si on n’aurait pas pu jouer chez nous contre eux. En revanche, Bordeaux possède des supporters pacifiques et on jouera dans notre stade. C’est un juste retour des choses pour tous les bénévoles du club.

     

    Eurosport