Triaud “C’est trop fragile”

     

     

    Au lendemain de la défaite à Toulouse, le président des Girondins de Bordeaux Jean-Louis Triaud est intervenu en conférence de presse afin d’exprimer son opinion sur la situation du club, et plus particulièrement au sujet des performances des joueurs. Le site officiel propose une retranscription de cette interview, tandis que Gold Fm met à disposition la version audio.

     

     

     

     

    Bonjour Jean-Louis, comment est-il possible d’inverser la tendance aujourd’hui ?

    Je me pose des questions, car le match était maîtrisé, puis, dans l’adversité, nous avons très vite paniqué. Il y a eu un manque de sang froid et peut-être un peu d’intelligence tactique. C’est vite la panique. Arrivés à un certain point, nous ne pouvons plus rien faire. Les joueurs doivent se prendre en charge pour réagir collectivement, et pas individuellement. Il faut garder cette solidarité et cette organisation que nous avions su mettre en place en 1ère mi-temps, sur le terrain. Cela vous va comme réponse ?

     

    Cela nous va, mais je ne suis pas sûr que ce soit la réponse que vos supporters attendent, en disant que cela fait 18 mois que cela dure. Je vous relate ce qu’ils disent et ils sont très déçus…

    Ils sont venus vous faire des confidences… Cela ne fait pas 18 mois, cela fait 19 maintenant… Tout a été à peu près essayé. Je ne vais pas revenir dessus car c’est un fait de jeu, mais je crois que le penalty est plus que douteux. Je me rappelle que le lendemain du match contre Nancy, Micoud avait fait la une de la presse. Ce matin, je ne vois rien, je n’entends parler de rien. Ce n’est pas une excuse. Mais, nous avons l’impression que le moindre grain de sable est un gros grain. Nous avons l’impression que cela a été le déclic qui a annoncé le début de nos problèmes. Vous savez, il n’y a pas de temps mort au football. Ce n’est pas comme au basket. Nous ne pouvons pas arrêter le match et l’entraîneur ne peut pas reprendre les joueurs 1 par 1 pour leur réexpliquer le mode de fonctionnement. C’est trop fragile. Il y a un problème de caractère, de mental, de solidarité. Je pense qu’à un moment, les joueurs devraient s’investir un peu plus sur le terrain et plus communiquer entre eux. Quand cela va bien ici, tout le monde se parle. Quand cela va mal, tout le monde se cache. Alors, il est facile de dire « c’est pas dans ma nature, c’est pas dans mon tempérament de parler ou de m’exprimer », mais il arrive un moment où il faut se faire violence. Je ne crois pas que nous en soyons encore arrivés à ce stade. Je ne sais pas jusqu’où il faudra aller pour qu’il y ait une réaction. En tout cas, cela est extrêmement décevant.

     

    Tout a été tenté. Le coach les a notamment fustigés à Saint-Etienne. Nous avons l’impression que cela ne suffit pas…

    Cela fait 9 mois que nous cherchons des excuses externes. Peut-être qu’il faudrait aussi se remettre en cause et qu’il y ait un peu plus de professionnalisme.

     

    Il n’y a que 3 jours entre les 2 matches. Il y a plusieurs méthodes. La vôtre serait-elle de les piquer au vif ?

    Au bout d’un moment, nous commençons à nous fatiguer. J’écoute les entraîneurs. Notre staff est riche en qualité et en effectif. Ils ont fait une analyse. Ils adopteront le comportement par rapport au groupe qui leur paraît le plus adapté. Je ne suis pas sûr que la batte de baseball soit la meilleure méthode. Mais cela fait envie quand même (rires, ndlr).

     

    Est-ce qu’il faut encore plus « taper » sur votre équipe, ou cela ne les enfoncera-t-il pas un peu plus ?

    C’est possible. Il doit y avoir une prise de conscience collective et individuelle de la part des joueurs. Ils ont envie de se ressaisir. Ils ont de l’amour propre, de la fierté. Je sais qu’ils ne sont pas satisfaits. Une fois que nous avons fait ce constat, et qu’eux-mêmes ont fait ce constat de satisfaction, que fait chacun, à titre individuel, ou dans le collectif, pour que cela change ? Quel est son investissement ? Avons-nous suffisamment le goût du sacrifice, de l’effort, de l’investissement ? Nous ne pouvons pas toujours essayer de se reposer sur les autres. Il faut qu’il y ait des prises d’initiatives à ce niveau-là.

     

    Jaroslav Plasil en parlait la semaine dernière. Il disait qu’il fallait que chacun se sacrifie pour l’autre. Nous n’avons pas eu l’impression qu’ils le faisaient tellement sur la pelouse…

    Je n’ai pas non plus eu cette impression. 1 joueur dans un effectif ne peut pas tout faire à lui tout seul. Il n’y a pas que des choses négatives. Il y a des garçons qui sont à la hauteur de nos attentes. Il y en a d’autres qui sont des petits garçons.

     

    Êtes-vous inquiet quand vous voyez que vous n’avez que 2 points d’avance sur le 1er relégable ? Regardez-vous derrière maintenant ?

    Je pense qu’il reste beaucoup de matches. Je ne suis pas vraiment inquiet. Mais, je l’avais déjà dit, il faut laisser le smoking au vestiaire et enfiler le bleu de travail. Si nous ne sommes pas capables d’être des artistes, au moins que nous soyons des tâcherons, courageux et travailleurs.

     

    Est-il dangereux d’avoir peu de joueurs qui ont l’expérience de jouer le maintien au sein de l’effectif ?

    Nous n’en sommes pas là. Nous n’allons pas passer d’une phase où nous pensons que le groupe a une qualité suffisante pour bien figurer, à une phase extrême où nous allons jouer le maintien. Il reste beaucoup de matches et d’occasions de réagir. Avant, je disais que nos joueurs avaient du talent, je vais maintenant modérer mon propos. Je reste persuadé que notre équipe a plus de potentiel que d’autres, pour éviter de jouer la descente.

     

    Francis Gillot a utilisé le mot « reconstruction » à propos du groupe l’autre jour. S’agit-il aussi de la reconstruction du club ? Si vous n’êtes pas européen…

    Chaque chose en son temps et à chaque jour suffit sa peine. Pour l’instant, nous sommes en train de nous poser des questions. Nous lâchons trop de points qui sont à notre portée. En menant 2-0 à Toulouse, nous devons faire mieux. Au vu des matches face à Saint-Etienne et Auxerre à domicile, il n’est pas normal que nous revenions avec 1 seul point. Nous pouvons invoquer beaucoup de choses, la malchance, le réalisme de nos adversaires, mais il y a un moment où il faut chercher plus loin les explications. S’il y avait un investissement supérieur ou un comportement collectif différent, si chacun faisait son petit effort supplémentaire au lieu de compter sur la réaction de quelques uns, nous arriverions à autre chose. Quand on voit un troupeau de moutons, il y en a un devant avec une cloche et tout le monde suit. J’aimerais qu’il y ait plus de cloches (rires, ndlr), de leaders dans le groupe, que ce que je vois aujourd’hui.

     

    Comment avez-vous trouvé la réaction des supporters à Toulouse lorsque les joueurs sont revenus pour le décrassage ?

    Leur réaction était à la hauteur de leur déception. Ce n’est pas mon rôle, mais j’aurais pu chanter avec eux.